Pas de plan B pour le climat

L’an dernier, la conférence des Nations unies sur le climat à Copenhague devait être un moment crucial et historique pour sauver l’avenir de notre planète et des générations futures. C’est malheureusement le constat de l’échec et du fiasco qui avait primé et le report des engagements contraignants jusqu’à la prochaine COP (conférence des parties) à Cancún sous présidence belge.

Pas de plan B pour le climat
©st. LLB

Delphine BOURGEOIS, Echevine (Europe) Ixelles. David CLARINVAL, Député-bourgmestre de Bievres. Christian FERDINAND, Conseiller scientifique (ULB). L’an dernier, la conférence des Nations unies sur le climat à Copenhague devait être un moment crucial et historique pour sauver l’avenir de notre planète et des générations futures. C’est malheureusement le constat de l’échec et du fiasco qui avait primé et le report des engagements contraignants jusqu’à la prochaine COP (conférence des parties) à Cancún sous présidence belge.

Sur le plan du financement, les pays développés s’étaient engagés à une aide de 7,2 milliards de dollars sur la période 2010 à 2012 pour les pays pauvres.

Une réussite à Cancún serait déjà la mise en place de ces dispositifs de financement pour les pays en développement promis dans l’accord de Copenhague. L’un des défis majeurs qui se jouera à Cancún sera donc la création de ce nouveau fond de financement pour le climat, qui devrait être alimenté par diverses sources jusqu’à un montant de 100 milliards de dollars dès 2020, un montant additionnel et comparable à l’actuelle aide publique au développement.

A ce titre, les ministres des Finances et de la Coopération au développement devraient à l’avenir jouer un rôle croissant dans les négociations climatiques. La question des sources de financement sera, espérons-le, l’un des points forts de Cancún.

Parmi les diverses sources de financement possibles pour atteindre ce montant de 100 milliards de dollars annoncé à Copenhague, une taxe carbone mondiale est proposée dans le rapport du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. Ce rapport onusien, publié le 5 novembre 2010, analyse dans le détail toutes les sources de financement possibles.

Il annonce pour la première fois au niveau mondial l’idée d’utiliser l’instrument éco-fiscal comme base planétaire de financement des efforts de réduction et d’adaptation aux changements climatiques à assurer par les pays non industrialisés.

Il sera très utile à Cancún de voir comment les gouvernements de certains pays (Etats-Unis, Chine, Brésil, Inde ) réagiront à ce rapport du groupe de conseil co-présidé par les Premiers ministres de Norvège et d’Ethiopie. Le groupe de conseil, constitué d’une vingtaine de membres (plus ou moins ceux du G20), a mis en évidence toute l’importance d’établir un prix mondial du carbone aux alentours de 20 à 25 dollars/t CO2 éq. en 2020 comme l’un des éléments clés pour atteindre les 100 milliards par an. En effet, 10 % à peine de ce prix mondial du carbone suffirait à générer 30 % de ce montant, soit 30 milliards par an ! Le solde de 90 % pourrait alors être utilisé selon le bon vouloir des Etats. En Belgique, le secrétaire d’Etat à la Fiscalité environnementale, Bernard Clerfayt, plaide par exemple depuis 2009 pour un "green tax shift", c’est-à-dire une baisse des impôts sur le travail financée par un prix sur le carbone.

Cette taxe mondiale sur le carbone augmenterait régulièrement le prix des énergies fossiles, accélérerait la nécessaire transition énergétique vers une économie décarbonnée et stimulerait l’innovation et le développement technologique au niveau mondial. Comme le précise le rapport de Ban Ki-moon sur les sources alternatives de financement : "Les nouveaux instruments publics, en particulier ceux basés sur le prix du carbone, sont attractifs parce qu’ils permettent à la fois d’augmenter les recettes et de fournir des incitants pour des mesures de réduction des émissions."

Par ailleurs, la conférence mondiale sur le climat à Cancún, c’est aussi 250 conférences qui se tiennent en marge du processus de négociation. Ce sera l’occasion pour certains délégués belges de s’inspirer des bonnes pratiques nationales, régionales et municipales pour le développement des nouvelles technologies, la création d’emplois verts et la construction de villes et quartiers durables.

Les défis écologiques et économiques se relèvent ensemble ! Le "green business" en est le meilleur exemple et la clé, les investissements dans les nouvelles technologies environnementales et les secteurs innovants créateurs d’emplois. Le défi climatique ne doit pas être vu comme une catastrophe. Au contraire, il représente une réelle opportunité de progresser, d’innover, d’investir et de développer de nouvelles filières. La relance de l’économie passe par cette croissance verte, par de nouvelles formations, par le développement de nouveaux incitants dans le cadre d’un marché mondial où le carbone aurait enfin un prix !

Il est plus que nécessaire que les pays européens, et la Belgique en particulier, préconisent une transition économique en matière environnementale. Nous devons inverser les visions conservatrices ou d’assistanat. Nous devons oser le changement en misant sur une forte croissance économique durable. Il est primordial d’investir au plus vite dans les nouvelles technologies environnementales de pointe qui nous rendront plus compétitifs et qui nous permettront de créer de nombreux emplois. D’autres pays l’ont déjà bien compris et intégré depuis longtemps et s’inscrivent directement dans la ligne de la stratégie de Lisbonne. A long terme, les gagnants de l’économie mondialisée seront ceux qui seront parvenus à s’adapter au défi climatique en intégrant les critères économiques, sociaux et environnementaux

Face à cette absence d’une réelle gouvernance mondiale (les décisions de l’Onu se prennent à l’unanimité !), les pays industrialisés, historiquement responsables de la plus grande part des émissions de gaz à effet de serre, devraient au moins assurer le financement à long terme des besoins d’adaptation aux changements climatiques des pays les plus durement touchés. Pour ce faire, la piste de financement la plus prometteuse et la plus efficace serait la création d’une taxe carbone mondiale. Mettre un prix sur le carbone est assurément la façon la plus efficace de lutter contre les changements climatiques. Les experts du Giec et de l’OCDE, comme nos experts belges, le disent : plus on internalisera le prix du carbone dans le coût des énergies fossiles, plus cette lutte sera facile et efficace.


Une opinion de Delphine Bourgeois, Echevine Ixelles; David Clarinval, député-bourgmestre de Bievres; Christian Ferdinand, Conseiller scientifique (ULB)

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